Tunisie, un nouveau code de la presse en débat à la haute instance

Publié le Jeudi 28 Juillet 2011 à 09:59
TAP - Après de larges concertations entre les différents intervenants dans le secteur de l'information, la Sous-commission de l'information relevant de la Haute instance pour la réalisation des objectifs de la révolution, la réforme politique et la transition démocratique est parvenue à mettre au point la version finale du projet de décret-loi relatif au code de la presse, de l'imprimerie et de l'édition qui sera soumis, jeudi, aux membres de l'instance pour en approfondir l'examen et donner leur avis.

Selon M. Ridha Jenayah, président de la sous-commission, « Parmi les nouveautés de ce projet de décret-loi figure, notamment, le renforcement des droits et des garanties apportés au journaliste, dont l'accès à l'information, la confidentialité des sources, la suppression de la peine privative de liberté en matière de diffamation, l'abolition du régime de l'autorisation déguisée et la création d'un conseil supérieur de l'audiovisuel ».

Ce nouveau code de la presse, a-t-il précisé, vient abroger l'ancien code qui était en vigueur avant la révolution, ajoutant que ce projet qui comporte 77 articles est le fruit de larges concertations et d'un débat profond entre les différentes parties intervenantes dans le secteur, en l'occurrence, l'instance nationale pour la réforme de l'information et la communication, le syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT), l'Union des éditeurs tunisiens, l'Association tunisienne des directeurs de journaux et le syndicat tunisien des directeurs des entreprises de presse.
« La version qui sera soumise à la haute instance satisfait les différentes parties », a-t-il soutenu.
Le nouveau code de la presse, a-t-il relevé, englobe quatre chapitres portant respectivement sur le régime des entreprises de presse, le statut du journaliste professionnel, le droit de rectification et de réponse et la responsabilité pénale.
En ce qui concerne le chapitre premier de ce code relatif au régime des entreprises de presse, M. Ridha Jenayah a précisé que le nouveau code simplifie les procédures antérieures à la publication des journaux, à travers la suppression du droit du ministre de l'Intérieur à intervenir pour arrêter l'édition d'un journal et l'institution du principe de la publication sans autorisation préalable.

En vertu du nouveau code, il suffit de déposer une simple déclaration auprès des services du Premier ministère chargés de l'information pour pouvoir éditer un périodique.
Le projet prévoit, également, des dispositions relatives à la transparence financière, au pluralisme et à la garantie de la diversité du paysage médiatique.

En vertu de ce décret-loi, une personne physique ou morale ne peut détenir plus de 30% du nombre total du tirage des différentes périodiques d'information à caractère généraliste.
S'agissant du statut du journaliste professionnel, M.  Ridha Jenayah a indiqué que l'article 7 du projet du décret-loi définit le journaliste professionnel comme étant une personne titulaire d'une maîtrise ou d'un diplôme équivalent et dont l'activité essentielle est de collecter des données, des informations, des opinions ou des idées, dans l'objectif de les publier et de les écouler, dans le cadre d'une entreprise ou plusieurs entreprises de presse écrite ou électronique, quotidienne ou périodique, ou au sein des agences de presse ou dans le cadre d'une ou de plusieurs entreprises opérant dans le secteur de l'audiovisuel.

Le président de la sous-commission a ajouté que l'octroi de la carte de presse sera désormais du ressort d'une instance baptisée « Commission du journaliste professionnel », précisant que cette commission sera composée de trois représentants issus du SNJT et de deux représentants de l'organisation des directeurs des entreprises de médias privés et d'un représentant des directeurs des entreprises publiques de presse.
La commission, a-t-il précisé, sera présidée par une personnalité réputée pour sa compétence en matière de droit de presse désignée par voie de décret présidentiel et sur proposition des membres de ladite commission.

S'agissant du chapitre des droits et des garanties apportées au journaliste professionnel, M. Jenayah a relevé que le projet interdit toute entrave à la liberté de circulation des données et des informations et toute atteinte à l'égalité des chances entre les différents médias ou au droit du citoyen à une information libre, pluraliste et transparente.

De surcroît, le droit d'accès du journaliste à l'information et aux données, a-t-il ajouté, a été institué conformément aux dispositions du décret-loi n°41 en date du 26 mai 2011 relatif au droit d'accès aux documents administratifs.

Le projet de décret-loi précité, a-t-il expliqué, énonce également que les opinions exprimées par le journaliste et les informations qu'il diffuse ne peuvent en aucun cas constituer un motif pour porter atteinte à l'honneur ou à l'intégrité physique et morale du journaliste.
Le projet, a-t-il encore précisé, protège la confidentialité des sources du journaliste et interdit sa poursuite pour des opinions exprimées ou informations diffusées conformément à la déontologie journalistique dans le cadre de l'exercice sa profession.

Dans le souci de garantir l'effectivité de ces garanties, a-t-il relevé, le projet de décret-loi prévoit des peines à l'encontre de toute personne transgressant les dispositions du décret-loi précité.
Pour ce qui est du troisième chapitre relatif au droit de rectification et de réponse, le président de la commission a souligné que l'actuel projet fixera le délai de recours en matière de réponse, en cas de refus du propriétaire du quotidien, à 6 mois, précisant que le projet prévoit, également, des dispositions portant obligation de prouver le préjudice porté en cas de droit de réponse.
En ce qui concerne la responsabilité pénale du journaliste, le président de la sous-commission a affirmé que l'ancien code de la presse a comporté plus de 12 peines privatives de liberté. Seules trois peines ont été maintenues dans le nouveau projet, dont deux ont été prévues par des conventions internationales ratifiées par la Tunisie.

Ces peines incriminent l'incitation à la discrimination raciale ou à la violence contre des personnes pour leur origine, leur religion ou leur sexe.

Elles pénalisent, également, la production, la distribution, la vente et l'importation de produits pornographiques à caractère pédophile.
La troisième peine, a-t-il ajouté, porte sur l'incitation à l'homicide ou au pillage, au viol ou à l'atteinte à l'intégrité physique.
Evoquant la diffamation, M. Jenayah a indiqué que le nouveau code supprime la peine privative de liberté tout en maintenant les peines pécuniaires.

Le législateur, a-t-il affirmé, institue, aussi, le droit à toute personne morale ou physique lésée, d'ester en justice, précisant que la charge de la preuve incombe à la partie lésée.
S'agissant du champ d'application de décret-loi, le président de la sous-commission a fait observer que cette législation s'applique aux journalistes opérant dans les médias écrits, audiovisuels et électroniques, à l'exception de certains aspects particuliers qui seront régis par un autre décret-loi relatif à la liberté de l'information audio-visuelle, à travers la création d'un conseil supérieur de l'audiovisuel par voie de décret-loi dont une copie a été remise aux membres de la haute instance pour la réalisation des objectifs de la révolution.


 

Commentaires 

 
#1 De quoi je me mèle ?
Ecrit par Jean Schmidt     28-07-2011 17:19
La Haute instance n'a aucune légitimité pour légiférer et adopter un Code de la presse. C'est une fois de plus une fâcheuse et scandaleuse dérive, même s'il ne s'agit que d'une proposition. C'est à la future Constituante d'adopter des textes "organiques". Il ne faut pas s'étonner de voir Ben Achour de plus en plus contesté, il a pris le mauvais chemin, celui de l'abus de pouvoir.
 
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