L’UE presse Erdogan de chercher le consensus après sa courte victoire au référendum

Publié le Lundi 17 Avril 2017 à 11:05
AFP - L'Union européenne (UE) a appelé dimanche le gouvernement turc à rechercher le "consensus national le plus large possible" après la courte victoire du "oui" au référendum accordant des pouvoirs accrus au président Recep Tayyip Erdogan.

"Au vu du résultat serré du référendum et des implications profondes des amendements constitutionnels, nous appelons (...) les autorités turques à rechercher le consensus national le plus large possible dans leur mise en oeuvre", écrivent dans un communiqué commun le président de la Commission de l'UE, Jean-Claude Juncker, la cheffe de la diplomatie européenne, Federica Mogherini, et le responsable de l'élargissement de l'UE, Johannes Hahn, l'opposition turque craignant de son côté une dérive autoritaire.

Le président Erdogan a placé les relations avec l'UE au cœur de la campagne, critiquant Bruxelles pour l'absence de progrès dans les discussions en vue de l'intégration de la Turquie et usant du qualificatif de "nazi" à l'égard de l'Allemagne et des Pays-Bas, qui ont interdit les meetings électoraux aux communautés turques sur leur territoire.

"Les amendements constitutionnels, et particulièrement leur application concrète, seront évalués à la lumière des obligations de la Turquie en tant que candidate à l'Union européenne et en tant que membre du Conseil de l'Europe", ajoute le communiqué.

Le communiqué signale encore que l'UE "attend l'évaluation" des observateurs internationaux "quant aux irrégularités évoquées" par l'opposition turque dans le scrutin.

"Nous encourageons la Turquie à prendre en compte les inquiétudes et les recommandations du Conseil de l'Europe, y compris au sujet de l'état d'urgence", poursuit le communiqué de l'UE.

Le Conseil de l'Europe, qui comprend les 28 membres de l'Union européenne et la plupart des autres pays européens, suit notamment l'évolution des droits de l'homme, autre sujet conflictuel avec la Turquie, l'UE ayant signifié à plusieurs reprises à Ankara son inquiétude sur les purges massives déclenchées par le président Erdogan après le coup d'État manqué de juillet.

Drapeaux de la Turquie ou bannières en faveur du "oui" à la main, une foule s'est formée dimanche devant le siège du parti au pouvoir AKP à Ankara pour écouter le discours au balcon du Premier ministre, Binali Yildirim, qui a sillonné le pays sans relâche ces dernières semaines dans le cadre de la campagne en vue du référendum.

Les dirigeants turcs ont proclamé dimanche leur victoire et celle-ci a été confirmée par l'autorité électorale. Toutefois, les deux principaux partis d'opposition contestent le résultat du scrutin et ont annoncé qu'ils déposeraient un recours.

MM. Erdogan et Yildirim ont salué cette victoire, mais parmi les gens venus la célébrer, beaucoup admettent être quelque peu déçus de ce résultat serré.

"Je m'attendais à plus", reconnaît ainsi Yadigar Boztepe, avec malgré tout un grand sourire et un drapeau turc à la main. Pour elle, le responsable de ce score étriqué est le président du parti nationaliste MHP, Devlet Bahçeli, allié du gouvernement sur cette révision constitutionnelle.

Il a en effet semé la zizanie dans le camp du "oui" en accusant jeudi un conseiller du président d'avoir évoqué l'instauration d'un système fédéral après le référendum, ce à quoi le MHP s'oppose totalement. Recep Tayyip Erdogan avait dû en personne apporter un ferme démenti.

«L'AKP a dû faire campagne seul" à cause des divisions internes au MHP, déplore pour sa part un homme qui se tient un peu plus loin et qui a requis l'anonymat.

Mais pour Mustafa Unsal, ce résultat est surtout le signe des divisions qui existent en Turquie : "Ce résultat montre qu'il y a une partie du pays qui ne veut pas rendre le pays plus fort et a une mentalité européenne, et les autres, qui sont de vrais Anatoliens."