L’Europe cherche à fournir une perspective, pour éviter la dislocation

Publié le Jeudi 15 Septembre 2016 à 13:42
Reuters - L'Union européenne tentera vendredi à Bratislava de dynamiser par des projets concrets une entreprise menacée par un calendrier électoral surchargé, la montée des populismes et le départ annoncé du Royaume-Uni, qui reste à concrétiser.

L'agenda adopté dans la capitale slovaque par les Vingt-Sept, réunis sans leur partenaire britannique, comprendra notamment le doublement du plan d'investissement Juncker et sera ensuite déroulé jusqu'au 60e anniversaire du traité de Rome fondateur de la Communauté européenne, en mars 2017.

Sécurité, défense, croissance et jeunesse sont les priorités, pas vraiment nouvelles, décrétées après le coup de tonnerre du référendum britannique du 23 juin et préparées notamment par le couple franco-allemand.

Pour l'Union européenne, un impératif : passer à la vitesse supérieure et reconquérir l'opinion sous peine de dislocation.

"Nous souhaitons que les inquiétudes de nos populations soient apaisées et que l'Europe soit à nouveau synonyme d'espoir et d'avenir", a déclaré jeudi Angela Merkel à propos du "plan de Bratislava" lors d'une rencontre à Paris avec François Hollande.

"Nous ne voulons laisser personne au bord du chemin", a dit la chancelière allemande, se disant persuadée que les autres Etats membres s'associeraient aux propositions de Berlin, de Paris et de la Commission européenne. "Il existe une véritable volonté d'avancer."

Un grand flou demeure pourtant sur les intentions du Royaume-Uni, dont la Première ministre, Theresa May, demande du temps, tandis que l'ancien Premier ministre belge Guy Verhofstadt, qui négociera pour le Parlement européen dans ce dossier, veut boucler la négociation d'ici les élections européennes de 2019, comme la plupart des capitales, dont Paris. 

Avant toute discussion, Londres doit activer l'article 50 du traité européen relatif à la sortie d'un pays de l'UE, un geste que le royaume ne devrait pas poser avant fin 2016.

"Theresa May dit 'Brexit is Brexit' mais il n'y a rien derrière", s'agace un haut diplomate français. "C'est préjudiciable à tout le monde, cette incertitude. Il faut garder la cohésion des 27 pour faire pression sur Londres."

Le brûlant dossier britannique ajoute à l'anxiété générale : l'Espagne n'a toujours pas de gouvernement, l'Italie se prononce cet automne sur la réforme constitutionnelle voulue par son président du Conseil, Matteo Renzi, l'Autriche revote le 4 décembre après l'invalidation du scrutin présidentiel de mai perdu de justesse par l'extrême droite, des élections majeures sont prévues en France et en Allemagne en 2017.

A court terme, les yeux se tournent vers la Hongrie, qui organise le 2 octobre un référendum à haut risque sur l'accueil des réfugiés arrivés dans d'autres pays de l'UE.

Le ton monte : face au cavalier seul du Premier ministre Viktor Orban, le chef de la diplomatie luxembourgeoise, Jean Asselborn, a demandé l'exclusion de la Hongrie de l'UE du fait de sa politique migratoire.

"La situation est sérieuse. L'Europe doit présenter une perspective", résume un haut diplomate français à propos de ces crises politiques dans une Europe qui peine à retrouver une croissance solide, sur fond de menace terroriste.

Depuis la fin juin, le couple franco-allemand, auquel est associé l'Italie, autre pays fondateur de l'Union, fait montre d'une unité synonyme de solidité en ces temps troublés.

François Hollande et Angela Merkel ont accéléré leurs rencontres. Réunis près de Naples le 22 août, à Evian le 2 septembre, le président et la chancelière se sont retrouvés jeudi à l'Elysée pour préparer le rendez-vous de Bratislava.

Le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a annoncé mercredi le doublement de son plan d'investissement de 315 milliards d’euros qu’il avait lancé en 2014 pour relancer la croissance en Europe.

Le plan, qui devait s’achever en 2017, sera prolongé jusqu’en 2023, a-t-il dit lors de son "discours sur l’état de l’Union" prononcé à Strasbourg.

Le mécanisme qui repose sur des investissements privés garantis par des fonds européens, aura une capacité de mobilisation de "500 milliards d'euros à l'horizon 2020" et même "630 milliards dès 2022", a dit Jean-Claude Juncker.

Il a également proposé mercredi de permettre aux consommateurs de téléphoner partout dans l'Union sans surcharge tarifaire, d'installer des accès à internet sans fil gratuits dans la plupart des villes et villages du continent, et de déployer la 5G, initiatives concrètes.

La firme américaine Apple vient d’être condamnée par la Commission à rembourser à l'Irlande 13 milliards d'euros au titre de l'impôt sur les bénéfices, une manière de contrer les accusations de collusion avec la finance.

Pour les jeunes, principales victimes du chômage en Europe, les Vingt-Sept prévoient d'élargir aux collégiens, lycéens ou apprentis le programme Erasmus d'échanges d'étudiants.