Le Bengladesh exécute un leader islamiste par pendaison

Publié le Mercredi 11 Mai 2016 à 11:11
Motiur Rahman NizamiAFP - Motiur Rahman Nizami, leader du Jamaat-e-Islami, a été pendu mardi dans la prison centrale de Dacca quelques jours après que la Cour suprême eut confirmé sa condamnation à mort. Cette exécution a suscité la crainte d'une nouvelle vague de violence dans ce pays…

Le chef du principal parti islamiste au Bangladesh, condamné à mort pour crimes de guerre, a été pendu mardi à Dacca, capitale déjà sous haute tension après les récents meurtres de militants laïcs et d'intellectuels.

Motiur Rahman Nizami, leader du Jamaat-e-Islami, a été pendu dans la prison centrale de Dacca quelques jours après que la Cour suprême eut confirmé sa condamnation à mort.

Le ministre de la Loi et de la Justice Anisul Huq a annoncé que le leader de 73 ans "a été pendu peu avant minuit" (18H00 GMT) après avoir refusé de demander la grâce présidentielle.
"Il a été exécuté entre 23H50 (17:50 GMT) et minuit (18H00 GMT)", a précisé Anisul Huq.

Cette exécution a suscité la crainte d'une nouvelle vague de violence dans ce pays à majorité musulmane sunnite où des blogueurs laïcs, des intellectuels et des représentants de minorités ont été assassinés par des islamistes présumés.

Trois dirigeants du Jamaat et une responsable du principal parti d'opposition, le Bangladesh Nationalist Party (BNP), ont été exécutés depuis 2013. Ces exécutions avaient déclenché des heurts en 2013 avec la police, aboutissant à la mort de 500 personnes.

"Nous avons attendu ce jour", a indiqué aux journalistes le ministre de l'Intérieur Asaduzzaman Khan. Les gens "se souviendront éternellement de ce jour".

Quelques heures avant l'exécution, des membres de la famille de Nizami ont pu le voir une dernière fois à la prison centrale de Dacca, entourée par des centaines de policiers et de forces de sécurité d'élite.

La sécurité avait été renforcée dans la capitale ainsi qu'à Pabna, région d'origine de Nizami, dans l'ouest du pays."Si quiconque tente de commettre un sabotage, nos forces de sécurité sont prêtes à l'identifier et à prendre les mesures qui s'imposent", a déclaré M. Khan aux journalistes.
Un étudiant en droit défenseur de la laïcité, deux militants homosexuels, un professeur, un tailleur hindou accusé par les islamistes d'avoir blasphémé le prophète Mahomet et un responsable musulman soufi ont été tués depuis un mois à coups de machettes.

Le Jamaat avait estimé que les accusations portées contre Nizami étaient fausses et visaient à déstabiliser la direction du parti, allié clé du BNP. Nizami était devenu le chef du Jamaat en 2000 et avait été ministre du gouvernement soutenu par les islamistes entre 2001 et 2006.

L'accusation estimait que le dirigeant avait joué un rôle de premier plan dans la création de la milice islamiste pro-pakistanaise Al-Badr qui a tué intellectuels, médecins et journalistes lors de la guerre d'indépendance. Les corps des victimes avaient été retrouvés les yeux bandés, les mains liées dans un marais de la banlieue de la capitale.

Nizami avait ordonné ces meurtres pour "paralyser intellectuellement" ce pays en devenir, avait estimé l'accusation.

L'islamiste a été condamné en 2014 par le tribunal international des crimes du Bangladesh (ICT), une juridiction controversée mise en place en 2010 par le gouvernement et qui a reconnu coupable de crimes de guerre plus d'une dizaine de responsables de l'opposition.

Les organisations de défense des droits de l'homme jugent que ces procès ne remplissent pas les standards internationaux et manquent notamment d'observateurs extérieurs.
Amnesty International avait demandé au gouvernement de suspendre l'exécution de Nizami.

La guerre de 1971, l'une des plus sanglantes du XXe siècle, a débouché sur la naissance du Bangladesh, qui était depuis 1947 une province du Pakistan appelée Bengale oriental, puis Pakistan oriental.