La Russie se donne deux ans pour développer un nouveau missile

Publié le Mercredi 06 Février 2019 à 11:13
AFP - La Russie s’est donné hier deux ans pour développer un nouveau type de missile terrestre à la suite de la suspension par Washington et Moscou du traité de désarmement nucléaire INF, faisant craindre une nouvelle course aux armements.

Avec la suspension de leur participation à ce traité crucial – annoncée vendredi par Washington et le lendemain par Moscou –, les deux puissances rivales ont désormais les mains libres pour développer des missiles terrestres d’une portée de 500 à 5 500 km, qui étaient jusqu’alors interdits par le document.

La signature de ce traité à la fin de la guerre froide, en 1987, avait mis un terme à la crise des euromissiles déclenchée par le déploiement des SS-20 soviétiques à têtes nucléaires ciblant les capitales occidentales.
Le président russe Vladimir Poutine avait menacé d’adapter des engins de portée intermédiaire jusqu’alors déployés en mer ou dans les airs – comme le permet le traité INF – pour qu’ils puissent être tirés à partir du sol si les Américains se retiraient.

Sans tarder, le ministre russe de la Défense, Sergueï Choïgou, a détaillé hier ses intentions : ce sera le système Kalibr, utilisé pour la première fois en opération par la Russie à l’automne 2015, qui sera ainsi adapté en variante terrestre avec pour horizon 2019-2020. « Au cours de la même période, nous devrons créer un système de missiles terrestres de longue portée », a ajouté M. Choïgou, se félicitant que le Kalibr a « fait ses preuves en Syrie ».

Moscou avait pour la première fois lancé le 7 octobre 2015 une salve de 26 missiles depuis un croiseur situé en mer Caspienne pour frapper des positions des rebelles syriens situées à 1 500 de kilomètres de là. Jusqu’alors connu au seul stade de prototype, cet équivalent des Tomahawk américains dispose ainsi d’un rayon d’action susceptible de couvrir toute l’Europe.

"Nous sommes à deux doigts d’une nouvelle course aux armements », constate Konstantin Makienko, expert au Centre d’analyse pour les stratégies et les technologies à Moscou, soulignant que la conversion des Kalibr en missiles terrestres serait rapide.

Selon M. Choïgou, les États-Unis travaillent eux-mêmes « activement à la création d’un missile terrestre d’une portée supérieure à 500 km », raison pour laquelle « le président russe a donné l’ordre de prendre des mesures réciproques ». Les États-Unis et la Russie s’accusent déjà mutuellement de violer le traité INF. Washington met ainsi en cause le système de missiles russe 9M729, tandis que Moscou évoque le système de défense antimissile américain Aegis Ashore déployé en Pologne et en Roumanie.

Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov s’est notamment inquiété hier de l’acquisition par le Japon de ce système d’interception.

Vladimir Poutine avait dévoilé en mars 2018 de nouvelles armées « invincibles » développées par son pays, dont une nouvelle génération de missiles hypersoniques, baptisés Avangard, pour lesquels des essais en décembre dernier ont témoigné d’une portée de 4 000 km selon le Kremlin. La nouvelle posture nucléaire américaine, rendue publique en 2018, évoque pour sa part la mise au point par les États-Unis d’un missile nucléaire de faible puissance ou d’un missile de croisière d’une portée qui violerait le traité INF.

La nouvelle posture nucléaire américaine, rendue publique en 2018, évoque pour sa part la mise au point par les États-Unis d’un missile nucléaire de faible puissance ou d’un missile de croisière d’une portée qui violerait le traité INF.