"L'islam est une part indissociable de notre culture" (Manuel Valls)

Publié le Jeudi 20 Octobre 2016 à 12:51
Manuel VallsAFP - Le Premier ministre Manuel Valls, remis au premier plan pour la présidentielle par les difficultés de François Hollande, a livré lundi soir un discours adouci sur la laïcité et l'islam, appelant "au rassemblement et à l'espérance".

Le chef du gouvernement, qui a ferraillé ces derniers mois avec une partie de la gauche sur sa conception de la laïcité, a cette fois mis de côté les sujets qui divisent (voile, burkini...) pour employer un ton rassembleur, avec notamment un message direct aux musulmans de France, "face à ce déchaînement qui vise toujours à pointer du doigt, à trouver des boucs émissaires".

Venu dans sa ville d'Evry pour installer un conseil local de la laïcité, le locataire de Matignon leur a dit, "du fond du coeur, et avec une part d'émotion, que la laïcité n'est pas dirigée contre eux, mais au contraire est là pour les aider, pour les protéger. L'Etat que j'incarne est là à leurs côtés", a-t-il assuré.

Dans une France chamboulée par les attentats jihadistes, où le Front national est crédité de plus du quart des intentions de vote, l'islam, l'immigration et plus largement les questions "identitaires" se sont affirmés comme des thèmes centraux du début de campagne présidentielle.

"La laïcité, c'est la France", a plaidé M. Valls, qui l'a qualifiée de "supplément d'âme" du pays.
Revenu dimanche du Canada, le Premier ministre prononçait son premier discours d'envergure depuis la publication la semaine dernière de nombreux propos polémiques de François Hollande dans le livre "Un président ne devrait pas dire ça...", qui ont déstabilisé moult socialistes.

Avec un chef de l'Etat déjà mal en point dans les sondages avant ce nouveau coup, l'hypothèse d'un recours à Manuel Valls si François Hollande renonçait est revenue au premier plan, alimentée par des déclarations de proches du Premier ministre.

"Moi je crois que dans les semaines qui viennent, il faudra savoir (...) être forts, être dignes dans nos débats, porter plus haut la politique et le pays, ne jamais abaisser notre exigence", a dit M. Valls, qui a notamment défendu "un patriotisme affirmé".

Le président de la République avait notamment suscité l'émoi dans un passage où il juge qu'il y a "trop d'immigration qui ne devrait pas être là" en France et qu'"il y a un problème avec l'islam".
"L'islam certes rencontre et pose des défis considérables à nos sociétés mais il n'est pas LE problème, (...) il n'est pas le problème qui poserait toutes les difficultés au pays", a rectifié en écho M. Valls.

"L'islam est une part indissociable de nous-mêmes, de notre culture et désormais de nos racines" et "l'islam de France, comme toutes les religions, a toute sa place en France", a encore assuré le Premier ministre.

S'il est régulièrement salué pour son dynamisme et sa constance dans ses idées, M. Valls, outre l'usure de plus de deux années à Matignon, souffre à gauche d'une image clivante qui menace son rêve d'un destin présidentiel.

Ce discours sur la laïcité visait "plus le rassemblement que la fracturation", a reconnu un des proches du Premier ministre. Ce dernier avait déjà soigné son image d'homme de gauche ces dernières semaines en défendant un "revenu universel".

Lundi soir, tout juste a-t-il répliqué à son jeune rival Emmanuel Macron, qui avait attaqué la "laïcité revancharde" du Premier ministre. "On la dit revancharde, je ne sais pas très bien ce que ça veut dire (...) La laïcité c'est tout simplement la laïcité", a-t-il plaidé.

Le Premier ministre va-t-il donner d'autres signes de présidentialisation, déjà entrevus fin août lors d'un discours à Colomiers ?

Samedi, il sera à Tours avec le patron du PS Jean-Christophe Cambadélis. Il entend affirmer que "la gauche de gouvernement ne peut pas être absente de la présidentielle", selon un proche, qui s'inquiète des bons sondages d'Arnaud Montebourg en vue de la primaire socialiste de janvier.