Irak : Les Etats-Unis s’opposent à une intervention syrienne

Publié le Vendredi 27 Juin 2014 à 15:13
AFP - Les États-Unis ont indiqué s'opposer à toute intervention militaire de la Syrie dans la crise qui secoue l'Irak, confronté à une offensive d'extrémistes sunnites, le régime de Damas ayant été accusé de mener des raids aériens contre les djihadistes.

Les États-Unis ont indiqué s'opposer à toute intervention militaire de la Syrie dans la crise qui secoue l'Irak, confronté à une offensive d'extrémistes sunnites, le régime de Damas ayant été accusé de mener des raids aériens contre les djihadistes. L'armée syrienne a mené mardi des raids aériens contre des insurgés du côté syrien de la frontière avec l'Irak, a déclaré jeudi le Premier ministre irakien Nouri al-Maliki à la BBC.

Pour la première fois, Nouri al-Maliki a jugé nécessaire une solution politique qui irait de pair avec une action militaire pour faire face à l'offensive des insurgés sunnites qui menace le pays d'implosion.

Maliki, qui s'exprimait lors d'un entretien avec le chef de la diplomatie britannique William Hague, semble finalement acquiescer aux demandes internationales pour qui seul un gouvernement rassemblant toutes les forces politiques et les communautés peut sortir le pays, miné par les divisions confessionnelles, de la crise.

La visite de William Hague à Bagdad est intervenue après celle de son homologue John Kerry, les États-Unis et leurs alliés s'employant depuis des jours à convaincre les dirigeants irakiens de tous bords de resserrer les rangs pour mettre en échec l'offensive lancée le 9 juin par des insurgés menés par les djihadistes de l'État islamique en Irak et au Levant (EIIL). "Nous devons avancer sur deux voies parallèles, la première réside dans les opérations militaires contre les terroristes et la seconde dans la poursuite du processus politique avec la réunion du Parlement à la date prévue pour élire un chef du Parlement et un président, et la formation d'un gouvernement", a dit Nouri al-Maliki.

Le Parlement élu a été convoqué pour se réunir le 1er juillet, selon un communiqué officiel de la présidence de la République. Jusque-là, Nouri al-Maliki disait vouloir régler par la seule voie militaire la crise née de l'offensive fulgurante des djihadistes qui ont pris en quelques jours de larges pans de territoires au nord, à l'ouest et à l'est de Bagdad.

Au pouvoir depuis 2006, Nouri al- Maliki, un chiite, est critiqué de toutes parts pour sa politique confessionnelle, notamment sa marginalisation de la minorité sunnite qui a alimenté le conflit actuel, et ses détracteurs, y compris des chiites, l'accusent d'accaparer le pouvoir. Son bloc est arrivé en tête des législatives d'avril, mais sans majorité, et depuis il ne parvient pas à former une coalition tant les divisions avec les autres forces politiques sont profondes. Les déclarations de Maliki semblent trancher avec sa mise en garde la veille à ses rivaux politiques contre toute tentative de le marginaliser et sa dénonciation d'"un coup d'État à l'encontre de la Constitution et du processus politique".

À son arrivée à Bagdad, William Hague a affirmé, selon un communiqué du Foreign Office, que l'État irakien était "menacé" dans son existence et que "le plus important facteur qui déterminera si l'Irak surmontera ou non ce défi est l'unité politique". Poursuivant sa mission sur l'Irak, John Kerry, après Paris, doit se rendre vendredi en Arabie saoudite, pays qui a accusé M. Maliki, un chiite, d'avoir conduit son pays au bord du gouffre par sa politique d'exclusion des sunnites. "La formation d'un gouvernement est notre principal défi", a dit, lors de sa visite en Irak en début de semaine, M. Kerry, dont le pays a promis une aide plus "efficace" à l'Irak si les dirigeants se montraient unis.

Depuis le 9 juin, les insurgés ont mis la main sur Mossoul, deuxième ville d'Irak, une grande partie de sa province Ninive (nord), de Tikrit et d'autres secteurs des provinces de Salaheddine (nord), Diyala (est), Kirkouk (nord), et Al-Anbar (ouest). Jeudi, l'armée a lancé une opération héliportée sur Tikrit, à la faveur de laquelle les forces spéciales ont repris l'université, selon des responsables, une opération qui vise à remettre la main sur la totalité de la ville. Après leur débandade aux premiers jours de l'offensive, les forces de sécurité, aidées de citoyens volontaires et de tribus pro-pouvoir, peinent toujours à repousser la progression des insurgés et ne parviennent pas à reprendre les territoires conquis par ces derniers.

Devant le retrait de l'armée irakienne de Kirkouk et de crainte d'un assaut des insurgés, les forces kurdes avaient pour la première fois pris le contrôle de cette ville multiethnique et disputée où s'est rendu jeudi le président de la région autonome du Kurdistan, Massoud Barzani.

Après avoir mobilisé des milliers de ses partisans contre les insurgés, l'influent chef chiite Moqtada al-Sadr, un allié de l'Iran chiite, a promis de "faire trembler la terre sous les pieds de l'ignorance et de l'extrémisme". Selon le New York Times, l'Iran a secrètement déployé des drones de surveillance en Irak et y convoie du matériel militaire par voie aérienne.

L'offensive des insurgés a fait plus de 1 000 morts et des centaines de milliers de déplacés, l'ONU avertissant que la crise mettait en péril la sécurité alimentaire du pays. L'EIIL, engagé dans la guerre en Syrie où il avance dans l'est, à la frontière irakienne, cherche à créer un État islamique dans une zone à cheval entre les deux pays. La coalition qu'il dirige rassemble d'ex-officiers de l'armée de Saddam Hussein, renversé par l'invasion américaine, des groupes salafistes et des éléments tribaux.