France : Violents heurts lors des manifestations contre la loi du travail

Publié le Vendredi 29 Avril 2016 à 12:11
Reuters - Des violences ont émaillé jeudi certaines des manifestations organisées à travers la France contre le projet de réforme du Code du travail, la mobilisation marquant le pas à quelques jours du début de l'examen du texte par les députés.

Les débordements, qui se sont produits en marge des manifestations notamment à Paris, Nantes, Rennes et Marseille, se sont soldés par 124 interpellations, portant à 382 le nombre total d'interpellations depuis le début du mouvement contre la loi Travail.

Au total, 24 policiers et gendarmes ont été blessés au cours de la journée. Un policier grièvement blessé à Paris, dont l'état était qualifié dans l'après-midi "d'urgence absolue", reste dans un état sérieux, même s'il va mieux, a déclaré le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve à la presse vers 23h30 après s'être rendu à son chevet à l'hôpital parisien de la Pitié-Salpêtrière.
Comme il l'avait fait dans l'après-midi lors d'un déplacement à Lyon, Bernard Cazeneuve a fermement condamné ces violences commises par "une poignée de casseurs qui ont cherché à faire dégénérer (...) ces cortèges et ces manifestations".

Il a assuré de la "détermination et fermeté totale de l'Etat", qui ne ferait preuve d'"aucune complaisance", faisant écho à la réaction du Premier ministre, en déplacement en Nouvelle-Calédonie et en Nouvelle-Zélande cette fin de semaine.

"Je condamne avec force les violences d'une minorité d'irresponsables. Ils devront rendre des comptes devant la justice. Soutien aux policiers", a déclaré Manuel Valls sur Twitter.

Le ministre de l'Intérieur a appelé à la responsabilité à la fois "ceux qui ont diffusé sur la police des affiches et des propos qui ont contribué à tendre" la situation (allusion à une affiche controversée d'une branche de la CGT déplorant des violences policières, ndlr) et "ceux qui essaient d'instrumentaliser ce contexte à des fins politiques en proposant qu’on interdise tout."
"L'état d'urgence n'est pas un état de convenance politique", a déclaré Bernard Cazeneuve, mais ce n'est pas non plus "un état d'agitation, ce n'est pas un état d'outrance", a-t-il poursuivi.

Dans la capitale, où 14.000 à 15.000 personnes ont défilé, les principaux heurts ont éclaté après l'arrivée du cortège place de la Nation, dans le XIIe arrondissement.

Environ 300 manifestants cagoulés ont jeté des pavés, des morceaux de bitume et même des extincteurs sur les forces de l'ordre qui ont procédé à 21 interpellations. Des vitrines situées dans des rues avoisinantes ont été brisées.

Le préfet de police de Paris Michel Cadot, qui s'est exprimé lors d'une conférence de presse en début de soirée, a décrit un groupe de casseurs "très organisés et méthodiques" qui ne "viennent certainement pas pour défiler."

A Marseille, 75.000 personnes, selon les organisateurs, et 4.800 pour la police, ont manifesté et 57 personnes ont été interpellées, selon une source policière.

A Rennes, où les syndicats ont dénombré 13.000 manifestants et la préfecture 4.000, 18 personnes ont été interpellées, six policiers ont été blessés et un manifestant a été touché à l'oeil, selon la police.

Quatre policiers ont été blessés et 41 personnes interpellées à Nantes après un défilé qui a réuni près de 10.000 manifestants selon les organisateurs et 8.500 selon les autorités. Des arrêts de bus ont été vandalisés, des poubelles mises à feu, et une voiture incendiée.
Depuis quelques semaines, Nantes est devenue la capitale du saccage", a dit Bruno Retailleau, le président Les Républicains du conseil régional des Pays de la Loire, dans un communiqué.
Au total, les sept syndicats opposés au projet de loi ont réuni 165.000 manifestants, chiffre supérieur au 9 avril, lorsque 120.000 personnes avaient défilé, mais deux fois moins que le 31 mars, selon le ministère de l'Intérieur.

La CGT revendique 500.000 manifestants, affirmant que la mobilisation "est désormais ancrée dans le pays", alors que les syndicats doivent de nouveau manifester le 1er mai.

Pour expliquer la stagnation de la mobilisation, les syndicats (CGT, FO, FSU, Solidaires, UNEF, UNL et FIDL) invoquent les vacances scolaires, qui ont démobilisé une partie des jeunes, notamment les lycéens.

"Le gouvernement a déjà fait quelques reculs, mais nettement insuffisants. Donc, cette mobilisation, c'est à la fois vis-à-vis du gouvernement, mais également vis-à-vis du Parlement", a dit Jean-Claude Mailly, secrétaire général de Force ouvrière.

Les opposants espèrent toujours que le débat parlementaire "permettra de faire bouger les lignes", a souligné pour sa part William Martinet, président du syndicat étudiant Unef.

Face à la levée de boucliers suscitée par la première version du texte, le gouvernement en a supprimé les mesures les plus contestées. L'exécutif, qui exclut un retrait du texte, espère également que les mesures annoncées en faveur de la jeunesse contribueront à essouffler le mouvement.