France : La reconnaissance d’un Etat palestinien débattue au parlement

Publié le Vendredi 28 Novembre 2014 à 10:29
AFP - Après leurs homologues britanniques et espagnols, les députés français ont commencé à débattre à leur tour, vendredi matin, de la reconnaissance de l’Etat palestinien à la faveur d’une résolution non contraignante qui devrait être votée mardi sans le soutien de la droite.

Le texte soumis aux députés par le groupe socialiste «invite le gouvernement à reconnaître l’État de Palestine en vue d’obtenir un règlement définitif du conflit» et juge que «la solution des deux États, promue avec constance par la France et l’Union européenne, suppose la reconnaissance de l’État de Palestine aux côtés de celui d’Israël».

Le débat a débuté à 09H30 devant des rangs clairsemés (une trentaine de députés) par une intervention du chef de file du groupe socialiste, Bruno Le Roux. Il est limité à 1H15 et sera suivi de la réponse du ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius. Le vote solennel aura lieu le 2 décembre, et le Sénat examinera un texte identique le 11.

Cette démarche, non contraignante pour le gouvernement, s’inscrit dans un mouvement européen pour que la reconnaissance de la Palestine, jusque-là envisagée comme l’aboutissement de négociations, soit utilisée comme un moyen de pression sur Israël afin de relancer un processus au point mort depuis l’échec de la médiation américaine au printemps dernier.

Ceci alors que la viabilité même d’un Etat palestinien est menacée par la colonisation et qu’un nouveau cycle de violences menace.

Répondant à l’invitation de personnalités israéliennes engagées pour la paix, des votes similaires viennent d’avoir lieu à la quasi-unanimité au Parlement britannique, au Sénat irlandais et au Congrès des députés espagnols. La Suède a reconnu l’Etat palestinien fin octobre, devenant le 135e Etat à le faire.

En France, la question est très sensible politiquement, à la fois parce que la cause palestinienne a toujours été très populaire et soutenue diplomatiquement et aussi parce qu’y vit la première communauté juive d’Europe (entre 500 et 600.000 personnes) qui dénonce une montée de l’antisémitisme ces dernières années.

Ce vote risque «d’exacerber la situation» en France, a ainsi jugé l’ambassadeur d’Israël, Yossi Gal, en faisant allusion aux incidents survenus lors de manifestations pro-palestiniennes, cet été, au moment de l’opération israélienne à Gaza.

A Paris, des rassemblements «pro-israéliens» sont prévus à la mi-journée près de l’Assemblée, et des «pro-palestiniens» en fin d’après-midi.

Au PS, une dizaine de députés (sur 289) n’ont pas signé la résolution. Parmi eux, l’Alsacien Armand Jung, président du groupe d’amitié France-Israël, et le maire de Sarcelles (Val d’Oise), François Pupponi, commune comportant de fortes communautés juive et musulmane.

L’UMP, favorable à la solution des deux Etats au bout d’un processus de paix, est à une très grande majorité hostile à cette démarche, même si elle a prévu de répartir son temps de parole entre deux contre (Claude Goasguen et Pierre Lellouche) et un pour (Axel Poniatowski).

Le chef de file du groupe UMP, Christian Jacob, argumente qu’on est «clairement dans le domaine réservé de l’exécutif». Candidat à la présidence du parti l’UMP, Nicolas Sarkozy a appelé à voter contre «une reconnaissance unilatérale quelques jours après un attentat meurtrier (l’attaque contre une synagogue perpétrée à Jérusalem) et alors qu’il n’y a aucun processus de paix».

A gauche, le texte sera soutenu «avec enthousiasme» par les écologistes et le Front de gauche qui avaient déposé leurs propres résolutions tandis que les radicaux de gauche sont partagés.

Pour les communistes, «c’est un combat historique», a rappelé le député François Asensi, qui a appelé le gouvernement à une reconnaissance «au lendemain du vote».

Mais le gouvernement, qui a donné son aval à la démarche des parlementaires, «n’est pas lié», a rappelé la semaine dernière Laurent Fabius pour qui la reconnaissance doit être «utile» à un règlement du conflit, et pas simplement symbolique».

Paris veut agir dans un cadre international concerté. Et notamment à l’ONU, où les Palestiniens ont annoncé leur intention de déposer une résolution réclamant la fin de l’occupation israélienne en 2016. Afin d’éviter le véto américain, la France tente avec ses partenaires européens de promouvoir un texte alternatif qui ne fixe pas de calendrier.

François Hollande a confirmé jeudi soir que Paris voulait organiser «une conférence internationale pour trouver une issue au conflit».

«Il y a une initiative diplomatique que la France doit conduire», a déclaré le président français aux médias France 24, RFI et TV5 Monde.

A noter la présence dans l’hémicycle de l’ancien secrétaire d’Etat Thomas Thévenoud pour la première fois depuis sa démission début septembre pour ses déboires fiscaux.