Fillon maintient sa candidature, malgré son éventuelle mise en examen

Publié le Mercredi 01 Mars 2017 à 15:38
François FillonReuters - François Fillon, qui a annoncé mercredi sa convocation par les juges le 15 mars en vue de sa mise en examen, a déclaré qu'il irait jusqu'au bout de sa candidature face à une tentative d'"assassinat politique".

Le candidat de la droite et du centre, gravement fragilisé par l'enquête sur les emplois présumés fictifs de son épouse révélés le 25 janvier par Le Canard enchaîné, a de nouveau dénoncé une instrumentalisation de la justice pour priver la France d'une alternance à droite et un "parti-pris" des médias.

"Par le choix de ce calendrier, ce n'est pas moi seulement qu'on assassine. C'est l'élection présidentielle. C'est le vote des électeurs de la droite et du centre qui est fauché", a-t-il lancé lors d'une déclaration solennelle à son QG de campagne.

L'ancien Premier ministre, qui se rendra devant les juges, a fait valoir que sa convocation intervenait deux jours avant la date-limite de dépôt des parrainages d'élus pour la présidentielle.
Le Conseil constitutionnel établit par la suite la liste officielle des candidats.

"C'est au peuple français que je m'en remets, parce que seul le suffrage, et non une procédure menée à charge, peut décider qui sera le prochain président de la République française", a poursuivi François Fillon, persistant à se poser en victime.

Avant de marteler : "Je ne céderai pas. Je ne me rendrai pas. Je ne me retirerai pas. J'irai jusqu'au bout parce qu’au-delà de ma personne, c’est la démocratie qui est défiée."

Après avoir annoncé le 26 janvier sur TF1 qu'il renoncerait s'il était mis en examen, François Fillon avait dit le 16 février au Figaro qu'il s'en remettait "désormais au seul jugement du suffrage universel".

Les spéculations sur l'avenir de la campagne à droite étaient à leur comble depuis l'annonce surprise, peu après 08h00, du report sine die de la venue de François Fillon au Salon de l'Agriculture prévue ce mercredi matin.  

La nouvelle avait pris de court même les membres de son entourage présents sur place, ainsi que les élus formant la délégation. Aucune explication n'était avancée alors que François Fillon avait appris dans la nuit, de son avocat, sa convocation par les juges d'instruction et sa probable mise en examen, selon une source proche du premier cercle.

Le candidat a alors décidé de convoquer les responsables des Républicains à son QG (Gérard Larcher, Xavier Bertrand, Valérie Pécresse, François Baroin, Bruno le Maire, Bernard Accoyer...) pour des entretiens individuels, selon une source proche du parti, afin de décider de la marche à suivre. Il s'est également entretenu au téléphone avec Nicolas Sarkozy et Alain Juppé, précise-t-on de même source.

Des scénarios contradictoires circulent sur la teneur et l'issue de ces consultations.
Selon un parlementaire LR, François Fillon, poussé notamment par Gérard Larcher, proche de longue date, se serait résolu à se retirer au profit d'Alain Juppé, finaliste malheureux de la primaire de la droite et du centre.

L'entourage du maire de Bordeaux, actuellement à Paris pour une réunion des présidents de métropoles à Matignon, avait affirmé à Reuters qu'il serait aux côtés de François Fillon pour sa déclaration, mais qu'il ne s'exprimerait pas. Gilles Boyer, ex-directeur de campagne d'Alain

Juppé, avait ensuite démenti cette information sur Twitter.
Après un tweet le 6 février relatif à une possible candidature de substitution ("NON c'est NON"), le maire de Bordeaux, qui était resté en retrait dans la tourmente, avait renouvelé son soutien à François Fillon sur son blog le 21 février sous le tiède intitulé "Un choix de raison".

Il écrivait notamment qu'il ne se prêterait pas à un éventuel "plan B (...) contre la volonté de l’intéressé".

Mais à des parlementaires "juppéistes", qui ont récemment déjeuné avec lui, le maire de Bordeaux avait confié vouloir y aller "si Fillon le lui demandait."

"Il a dit à Juppé 'Est-ce que tu serais prêt à me succéder?' Juppé lui a répondu qu'il ne le ferait que s'il le lui demandait expressément'", rapporte ce proche du premier cercle.

C'était sans compter avec Nicolas Sarkozy et ses soutiens; mais aussi les "quadras" du parti.
Selon des élus LR, l'ancien président se serait catégoriquement opposé à "l'option Juppé", poussant pour la candidature du sénateur-maire de Troyes François Baroin. Une perspective intenable pour les autres "quadras" Valérie Pécresse ou Xavier Bertrand.

D'autres sources expliquent que Nicolas Sarkozy a simplement exhorté son ancien Premier ministre à "tenir bon".

"Il a eu Sarkozy au téléphone qui lui a dit de tenir bon. Larcher lui dit qu'il faut lâcher, (Jean-Christophe) Lagarde lui dit que s'il est mis en examen, les centristes ne le soutiendront pas", rapporte la source au fait des discussions.

Patrick Stefanini, son directeur de campagne condamné en 2004 avec Alain Juppé dans l'affaire des emplois fictifs de lui a dit : 'Si vous êtes mis en examen, moi je ne sais pas faire'", ajoute cette même source.

Selon plusieurs élus, François Fillon aurait beaucoup hésité, remaniant son intervention, prévue à 12h00 mais retardée, à la dernière minute. "Il a été à deux doigts de lâcher, vers 10h30, mais à 11h00-11h30, il s'est repris", témoigne l'un d'eux.

"On est dans une sale situation", juge un parlementaire LR. "On est dans un truc de dingue", ajoute un autre.

Le candidat a ensuite quitté son QG souriant, entouré de Valérie Pécresse, Jérôme Chartier et Gérard Longuet, notamment, pressé de questions par les journalistes qui l'ont suivi jusqu'à une brasserie proche où le groupe s'est attablé. Filmé et "mitraillé" à travers la vitre par une nuée de cameramen et de photographes, François Fillon, goguenard, les a pris en photo avec son téléphone portable.

Il devait ensuite se rendre au Salon de l'agriculture pour y mener la visite qu'il avait annulée dans la matinée.