Deux forcenés tués, et trois blessés dans un assaut policier à Saint-Denis

Publié le Mercredi 18 Novembre 2015 à 09:17
AFP - Deux forcenés sont morts dont une femme qui s'est fait exploser, un suspect est encore retranché, selon des sources policières. Trois hommes ont été arrêtés et placés en garde à vue, a-t-on indiqué de source judiciaire, dans un assaut policier d'ampleur lancé mercredi avant l'aube à Saint-Denis...

Cinq jours après les attentats de Paris, un assaut policier d'ampleur a été lancé mercredi avant l'aube à Saint-Denis, en proche banlieue parisienne, ciblant Abdelhamid Abaaoud, organisateur présumé des tueries qui ont fait 129 morts vendredi.

Deux forcenés sont morts dont une femme qui s'est fait exploser, un suspect est encore retranché, selon des sources policières. Trois hommes ont été arrêtés et placés en garde à vue, a-t-on indiqué de source judiciaire. Un homme qui dit avoir hébergé deux personnes "qui venaient de Belgique" dans l'appartement visé l'assaut a été interpellé dans le centre-ville complètement bouclé par les forces de l'ordre, a constaté une journaliste de l'AFP.

Au moins trois policiers ont également été blessés au cours de l'assaut. L'opération a été lancée vers 04H30 mercredi matin dans le centre de Saint-Denis par la sous-direction antiterroriste de la police judiciaire et le Raid, a-t-on appris de sources proches de l'enquête et du parquet de Paris.

L'opération mobilisant également des militaires et des hélicoptères restait en cours vers 08H30 alors que, selon son entourage, François Hollande se trouve dans son bureau à l'Elysée avec le Premier ministre Manuel Valls et le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve.

La cible de cette vaste intervention est un appartement de Saint-Denis situé à l'angle de la rue de la République et de la rue Corbillon, à une vingtaine de minutes à pied du Stade de France, qui était l'une des cibles des attentats de vendredi.

Alexia, qui se trouvait à sa fenêtre, a entendu "des tirs à partir de 04H25, des +boum+ comme des grenades puis des rafales intermittentes", a-t-elle raconté.

"On se croirait en guerre", a témoigné Hayat, 26 ans, qui avait passé la nuit chez des amis, rue du Corbillon. "J'aurais jamais pensé que des terroristes puissent se cacher ici. J'aurai pu me prendre une balle."

"Les forces de l'ordre sont très tendues, sur le qui-vive", a raconté le maire Didier Paillard à l'AFP. "Un hélicoptère est au-dessus de la ville, les transports en commun, le métro, le tramway, sont arrêtés".

Les écoles et collèges du centre-ville sont "fermés aujourd'hui", a annoncé la préfecture de Seine-Saint-Denis. Les habitants ont été priés de ne pas sortir de chez eux.
Selon une source policière, la cible de l'assaut est Abdelhamid Abaaoud, "cerveau" présumé des attentats de vendredi. Membre de l'organisation Etat islamique (EI), qui a revendiqué les pires attentats de l'histoire de France. Ce jihadiste belge de 28 ans, surnommé Abou Omar Soussi ou Abou Omar al-Baljiki, est recherché depuis janvier, soupçonné d'avoir également projeté des attentats en Belgique.

Salah Abdeslam, 26 ans, soupçonné d'avoir été l'un des tireurs qui ont mitraillé vendredi soir les terrasses de cafés et restaurants parisiens, avec son frère Brahim Abdeslam, qui s'est fait exploser, est aussi toujours activement recherché, notamment en Belgique, où les attaques ont été organisées selon les autorités.

Les enquêteurs disposent par ailleurs d'une vidéo accréditant l'existence d'un autre assaillant dans leur commando qui circulait à bord d'une Seat noire. Il pourrait être lui aussi en fuite.
Deux complices présumés ont par ailleurs été arrêtés samedi dans le quartier bruxellois de Molenbeek, plaque tournante du jihadisme, et inculpés par la justice belge pour "attentat terroriste". Ces deux hommes, Mohammed Amri, 27 ans, et Hamza Attou, 20 ans, sont aussi soupçonnés d'avoir exfiltré Salah Abdeslam en Belgique après les tueries.

Les trois équipes coordonnées de jihadistes, qui ont fait 129 morts (dont 117 ont été identifiés) et 352 blessés (221 encore hospitalisés dont 57 en réanimation), auraient ainsi été composées de neuf hommes: trois kamikazes aux abords du Stade de France à Saint-Denis, trois autres dans la salle de spectacles du Bataclan et trois assaillants pour les terrasses de bars et restaurants à Paris.
Plusieurs kamikazes ont déjà été identifiés, tous français: Samy Amimour (28 ans), Omar Ismaïl Mostefaï (29 ans), Bilal Hadfi (20 ans) et Brahim Abdeslam (31 ans).

Mostefaï, Amimour et Hadfi se sont rendus en Syrie. C'est probablement le cas aussi des deux frères Abdeslam.

Les policiers ont aussi diffusé la photo d'un des kamikazes du Stade de France, dans le cadre d'un appel à témoins, pour obtenir des informations sur cet homme passé par la Grèce cet automne. On a retrouvé près de son cadavre un passeport syrien dont l'identité correspond à celle d'un soldat de Bachar al-Assad tué il y a plusieurs mois.

En Belgique, où le niveau d'alerte a été relevé, un autre frère Abdeslam, Mohamed, a conseillé à Salah "de se rendre".

Autre jihadiste, français cette fois, qui intéresse les enquêteurs: Fabien Clain, 35 ans, vieux routier toulousain des filières radicales, qui a revendiqué au nom de l'EI dans un enregistrement les attaques parisiennes.

Sur le plan politique, alors que l'ambiance est de moins en moins à l'union nationale malgré un relatif consensus autour de la réponse sécuritaire portée par François Hollande, le gouvernement présente ses premières mesures d'exception contre le terrorisme décidées après le carnage sans précédent.

Le Conseil des ministres doit examiner mercredi le projet de loi sur la prolongation de l'état d'urgence pour trois mois, qui doit être voté jeudi par l'Assemblée nationale et vendredi par le Sénat. Un état d'urgence jusqu'alors confiné à la métropole, qui sera étendu à l'outre-mer.
Pour organiser la riposte militaire, François Hollande rencontrera Barack Obama à Washington le mardi 24 novembre et Vladimir Poutine à Moscou le jeudi 26, dans l'espoir d'une coalition unique visant à "détruire" l'EI.

Le président russe a ordonné à sa marine de "coopérer" avec la France.

Le président américain a salué mercredi le rôle de Moscou dans les pourparlers visant à mettre fin à la crise en Syrie. La Russie a été "un partenaire constructif à Vienne en essayant de créer une transition politique" en Syrie, a déclaré M. Obama en référence aux récents pourparlers internationaux en Autriche.

Paris a réclamé mardi l'assistance militaire des pays de l'Union européenne, après une nouvelle nuit de bombardements français à Raqa, fief de l'EI, pour le troisième jour consécutif. L'UE a fait part de son soutien "unanime".

A Paris, des dizaines de personnes continuent de se recueillir chaque jour devant les lieux des attentats, dans une ambiance pesante.