Crise dans le Golfe : Trump appelle l’émir du Qatar, et se pose en médiateur

Publié le Jeudi 08 Juin 2017 à 08:46
AFP - L'imprévisible Donald Trump a décidé d'intervenir dans la crise diplomatique frappant les pays du Golfe. Alors que l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis ont accentué mercredi la pression sur le Qatar, trois jours après avoir rompu leurs relations avec leur partenaire, le président américain Donald Trump a appelé mercredi l'émir du Qatar, proposant son aide pour apaiser la grave crise qui oppose Doha à ses voisins. Lors d'un entretien téléphonique avec le cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani, Donald Trump a évoqué l'idée d'une rencontre à la Maison-Blanche pour aplanir les différends.

Sans aller jusqu'à demander un changement de régime au Qatar, l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis ont exigé que leur voisin qatari modifie sa politique et réintègre le consensus régional sur les sujets sensibles des mouvements islamistes radicaux et des liens avec l'Iran chiite, grand rival du royaume saoudien sunnite dans la région.

Lundi, l'Arabie saoudite, Bahreïn, les Émirats arabes unis, l'Égypte et le Yémen ont rompu toute relation avec le Qatar, la pire crise diplomatique dans la région depuis des années. Ils ont été suivis par la Mauritanie. Le ministre d'État émirati aux Affaires étrangères Anwar Gargash a déclaré à l'Agence France-Presse que la question ne portait pas sur « un changement de régime » mais sur la nécessité d'un « changement de politique ». Le ministre a accusé le Qatar de se comporter en « champion de l'extrémisme et du terrorisme dans la région ».

« Nous avons atteint maintenant un cul-de-sac dans nos tentatives pour convaincre le Qatar de changer de direction », a-t-il ajouté en appelant ce pays voisin à « respecter les règles de la sécurité collective ». Anwar Gargash a énuméré les conditions en vue d'une normalisation avec le Qatar qui a rejeté dès lundi les accusations à son encontre.

Le ministre a demandé à ce pays de cesser d'utiliser sa chaîne Al-Jazeera pour promouvoir « un programme extrémiste », de mettre fin à la présence à Doha de dirigeants des Frères musulmans, de s'écarter du mouvement islamiste palestinien Hamas et d'agir contre des personnes ayant eu des liens financiers avec des réseaux djihadistes. Le chef de la diplomatie saoudienne Adel al-Jubeir, qui s'est rendu à Paris et à Berlin, a déclaré mercredi n'avoir demandé de médiation ni à la France ni à l'Allemagne. « Mais nous le ferons dans le cadre du Conseil de coopération du Golfe (CCG). »

Créé en 1981, le CCG, qui regroupe des monarchies pétrolières sunnites contrôlant le tiers des réserves mondiales de brut, comprend l'Arabie saoudite, Bahreïn, le Qatar, les émirats, le Koweït et Oman. Ces deux derniers pays n'ont pas rompu avec le Qatar. Tentant une médiation, l'émir du Koweït a eu mardi des entretiens avec le roi Salmane d'Arabie saoudite et il est parti mercredi pour les émirats. Il s'est ensuite rendu au Qatar où il a été reçu par l'émir, selon l'agence de presse koweïtienne KUNA.

Mardi, le président américain Donald Trump, dont le pays est un allié de Riyad et de Doha, avait jeté le trouble en soutenant dans une série de tweets l'isolement du Qatar qu'il a accusé de jouer un rôle dans le financement de l'extrémisme islamiste. C'est peut-être « le début de la fin de l'horreur du terrorisme », a-t-il écrit. Par ces déclarations, le président a instillé un doute sur l'avenir de la grande base aérienne américaine d'Al-Udeid, dans le désert du Qatar, qui joue un rôle opérationnel clé dans la lutte contre le groupe djihadiste État islamique (EI) en Syrie et en Irak.

Mais, revirement quelques heures plus tard, Donald Trump a souligné qu'un CCG « uni était crucial pour vaincre le terrorisme et promouvoir la stabilité dans la région », lors d'un entretien téléphonique avec le souverain saoudien. Et mercredi, il a proposé « d'aider les différentes parties à résoudre leurs différences ». De son côté, la Turquie, qui entretient des liens étroits avec le Qatar, a multiplié les appels à l'apaisement. Le Parlement turc a toutefois approuvé mercredi la mise en œuvre d'un accord de 2014 permettant le déploiement de troupes sur une base turque au Qatar, signe fort de soutien à l'allié qatari.

La crise dans le Golfe a entraîné une suspension de vols aériens, la fermeture des frontières terrestres et maritimes avec le Qatar, ainsi que des interdictions de survol aux compagnies qataries et des restrictions aux déplacements des personnes. Le Qatar s'est montré rassurant quant à la disponibilité de produits alimentaires, en affirmant être en possession de stocks pour un an. Des habitants paniqués avaient pris d'assaut les supermarchés à l'annonce lundi de la fermeture des frontières terrestres, maritimes et de l'espace aérien.