Bahreïn/ Législatives : Le pouvoir crie victoire malgré les appels au boycott

Publié le Dimanche 23 Novembre 2014 à 11:04
Les Bahreïnis ont élu leurs députés.AFP - Les Bahreïnis ont élu samedi leurs députés avec un taux de participation de 51,5% selon les autorités, malgré les appels de l'opposition au boycottage des premières élections générales depuis la contestation anti-régime de 2011 dans ce petit royaume du Golfe allié des Etats-Unis.

"Le taux de participation aux élections législatives a été de 51,5%", selon les premières estimations, a annoncé le ministre de la Justice, cheikh Khaled Al-Khalifa, également président de la haute commission électorale.

Se félicitant d'un scrutin "historique", le ministre a indiqué que les Bahreïnis "prouvent qu'ils pourront aller de l'avant dans une nouvelle phase politique".
Le chef du principal groupe de l'opposition chiite, cheikh Ali Salmane, avait prédit un taux de participation ne dépassant pas 30%.

Au terme d'une campagne terne des candidats, pour la plupart sunnites, la majorité chiite s'est fortement mobilisée pour assurer la réussite du boycott, décidé par l'opposition qui ne cesse de dénoncer la "répression" et milite en faveur d'une "véritable monarchie constitutionnelle".

A deux heures de la clôture du scrutin, prolongé de deux heures, un bureau de vote d'une circonscription de Sanabes, village chiite à l'ouest de Manama, n'avait accueilli qu'environ 10% des inscrits, a indiqué à l'AFP un observateur d'une ONG locale.

Dans le centre de Sanabes, des heurts ont opposé en fin d'après-midi de jeunes protestataires --certains masqués et armés de cocktails Molotov-- aux forces de sécurité qui, déployées en nombre autour du village, ont tiré des gaz lacrymogènes, a constaté un journaliste de l'AFP.
Les commerces ont fermé à Sanabes, comme dans d'autres villages chiites, où se sont produits des incidents similaires, selon des témoins.

Des pneus enflammés formaient des colonnes de fumée au-dessus de certains quartiers d'au moins trois villages survolés par un hélicoptère de la police.Dans un communiqué, l'opposition a salué "les électeurs qui ont boycotté" un scrutin loin de "régler la crise politique".

Des dissidents ont qualifié les élections de "mascarade" et le chef du Wefaq (principal mouvement d'opposition), cheikh Ali Salmane, a exigé la fin du "monopole du pouvoir" exercé par la dynastie sunnite des Al Khalifa, faute de quoi il pourrait y avoir une nouvelle "explosion" de violence.

Dans la précédente législature élue en 2010, 18 députés du Wefaq s'étaient retirés en 2011 pour protester contre la "répression".
Outre les législatives, des municipales ont été organisées le même jour. Un deuxième tour est prévu samedi prochain.

Au total, 349.713 électeurs inscrits étaient appelés à choisir 39 députés de la Chambre parmi 266 candidats, dont 23 anciens parlementaires. Un candidat chiite a été élu d'office après le désistement du seul autre candidat de sa circonscription.

A Rifaa, banlieue aisée à majorité sunnite du sud de Manama, une centaine de personnes, principalement des hommes vêtus de la robe blanche traditionnelle, faisaient la queue une demi-heure avant l'ouverture des bureaux de vote.

"Ce scrutin va contribuer à développer le pays sous la conduite du roi", a affirmé Naima El-Heddi, fonctionnaire âgée d'une trentaine d'années.

Plus au nord, à Jidhafs, village chiite, les électeurs étaient rares en milieu de journée dans un bureau de vote d'une circonscription comptant plus de 9.000 inscrits. "J'ai recensé une centaine de votants plus de deux heures après le début du scrutin", a déclaré un observateur.

Dans ce village, ainsi qu'à Sanabes, barricades et bennes à ordures brûlées témoignaient d'affrontements s'étant produits la veille, selon des témoins.
Plus loin, à El-Diah, toutes les rues du village étaient entravées par des troncs d'arbres, des blocs de béton, des sacs de ciment et des ordures, afin, selon les autorités locales, d'empêcher les gens d'aller voter.

"Ceux qui voulaient aller voter ont été prévenus il y a une semaine que la circulation serait bloquée ce samedi dans le centre d'El-Diah", a expliqué Yassine, partisan d'un groupe radical. Pour ce chômeur de 35 ans, "les élections n'ont pas de sens".
"C'est une farce", a renchéri Oum Hussein, une femme drapée de noir selon qui "le boycottage sera un succès".

Dans un entretien vendredi avec l'AFP, le chef du Wefaq a expliqué que le boycott "témoigne d'un rejet par le peuple qui réclame des réformes démocratiques".

La ministre de l'Information et porte-parole du gouvernement, Samira Rajab, a pour sa part indiqué que le pouvoir était prêt à reprendre le dialogue avec l'opposition.