Alexis Tsipras gagne son pari, et savoure un 3ème succès électoral

Publié le Lundi 21 Septembre 2015 à 11:27
  Reuters - Alexis Tsipras, qui remettait dimanche son mandat en jeu en Grèce, a gagné son pari en remportant un succès électoral plus net que prévu, qui le relégitime au moment d'appliquer le troisième plan d'aide financière accordé par les partenaires d'Athènes.

Avec 35,47% des suffrages et 145 élus au Parlement, son parti Syriza est en léger recul par rapport aux élections du 25 janvier qui l'avaient propulsé au pouvoir mais il ne perd que quatre sièges et réussit une performance que n'avaient pas vu venir les instituts de sondage.

Le Premier ministre grec, démissionnaire en août, va pouvoir s'atteler à la formation d'un nouveau gouvernement en reconduisant sa coalition avec le parti des Grecs indépendants (AN.EL, droite souverainiste) de Panos Kammenos.

Il sera investi dans ses fonctions dans l'après-midi, a-t-on appris auprès de la présidence de la République.

S'exprimant dimanche soir devant ses partisans dans le centre d'Athènes, Tsipras a déclaré qu'il se "sentait légitimé" par ce succès.

La "seconde chance" offerte par les électeurs grecs au Premier ministre démissionnaire s'affiche à la une de tous les quotidiens grecs lundi matin.

Tsipras, notent les éditorialistes, a réaffirmé son emprise sur le paysage politique grec mais va devoir s'atteler à la lourde tâche de reconstruire un consensus dans une société morcelée et traumatisée par des années d'austérité.

Lui qui avait volontairement quitté ses fonctions le 20 août et remis son mandat en jeu abordait pourtant ce scrutin dans une position délicate: il a lui-même admis pendant la campagne pas avoir obtenu "l'accord que nous voulions avant les élections de janvier", il a été accusé de trahison par ses anciens alliés et Vangelis Meïmarakis, le dirigeant de Nouvelle Démocratie (droite), l'a taxé de mensonge.

Mais à 41 ans, le chef de file de Syriza a remporté dimanche son troisième succès électoral en huit mois après les élections du 25 janvier et le référendum du 5 juillet contre les mesures d'austérité - "une œuvre d'art de la stratégie politique", a salué lundi matin le président du Parlement européen, le social-démocrate allemand Martin Schulz, qui goûte moins son alliance renouvelée avec la droite souverainiste. D'après des résultats portant sur la quasi-totalité des suffrages exprimés, Syriza retrouve pratiquement son niveau du 25 janvier même si le parti de la gauche radicale perd d'un scrutin à l'autre 330.000 voix à 1,9 million de suffrages.

La participation au scrutin a baissé de près de sept points par rapport à janvier, tombant de 63,6 à 56,5%.

Avec 28% des suffrages exprimés, Nouvelle Démocratie est relégué à plus de sept points derrière Syriza.

Tsipras et son parti ont en outre réduit au silence les frondeurs qui avaient refusé l'accord avec les "institutions" et créé leur propre parti, Unité populaire, sous la houlette de l'ancien ministre Papagiotis Lafazanis.

Malgré le soutien de Yanis Varoufakis et de l'ex-présidente du Parlement Zoe Konstantopoulou, ce nouveau mouvement n'a pas franchi dimanche le seuil des 3% indispensable pour entrer au Parlement.

"En Europe aujourd'hui, la Grèce et le peuple grec sont synonymes de résistance et de dignité et ce combat va se poursuivre ensemble pendant quatre autres années", a promis Alexis Tsipras dans son discours de victoire dimanche soir.

"Nous avons devant nous des moments difficiles, mais nous possédons des bases solides. Nous ne survivrons pas à ce combat par magie mais nous pouvons le faire en travaillant dur."
Il n'a pas fait allusion au nouveau plan de sauvetage de 86 milliards d'euros négocié avec la zone euro en juillet. Mais Syriza a fait campagne pour sa mise en œuvre, tout en promettant des mesures pour protéger les plus vulnérables.

Lundi matin, un cadre influent du parti a déclaré que la négociation d'un allègement de la dette grecque, à peine inférieure à 170% du PIB, figurerait en tête des priorités du nouveau gouvernement Tsipras.

Toujours selon ce cadre de Syriza, Alexis Tsipras envisage de former un conseil national de politique européenne qui intégrerait des représentants d'autres partis siégeant au Parlement. "Nous allons demander à toutes les forces politiques de soutenir nos efforts", a-t-il dit.

Mis à part les néo-nazis d'Aube dorée, qui restent la troisième force politique du pays avec 18 sièges, et les communistes du KKE (15 élus), les autres partis au nouveau Parlement acceptent tous le principe des réformes en échange d'une aide financière qui a permis à la Grèce de se maintenir dans la zone euro.

La première tâche du gouvernement Tsipras II sera de persuader les créanciers européens que des réformes en nombre suffisant ont été mises en œuvre pour que la prochaine tranche d'aide dans le cadre du plan soit effectivement versée. Le plan de sauvetage doit faire l'objet d'un réexamen chaque mois.

Le président de l'Eurogroupe des ministres des Finances de la zone euro, Jeroen Dijsselbloem, s'est dit "prêt à travailler étroitement avec les autorités grecques et à continuer à accompagner la Grèce dans ses efforts de réformes ambitieuses".

Alexis Tsipras va devoir s'attaquer aussi au dossier des réfugiés, le pays étant une des portes d'entrée majeure dans l'Union européenne pour des milliers de migrants qui cherchent à atteindre les pays riches d'Europe du Nord. Il participera mercredi au Conseil européen extraordinaire prévu à ce sujet.