Le FMI plaide pour un nouveau modèle de développement en Tunisie

Publié le Lundi 29 Février 2016 à 13:11
AFP - La Tunisie, qui négocie un nouveau prêt avec le Fonds monétaire international (FMI), doit revoir son modèle de développement pour "bâtir une croissance inclusive", a affirmé dans un entretien à l'AFP le nouveau représentant du Fonds dans ce pays, Robert Blotevogel (…).


"Les premières indications (...) ne font pas croire qu'il y a aura une grande reprise" cette année dans le secteur du tourisme, a estimé M. Blotevogel.

L'agriculture devrait également réaliser des performances moindres. L'an dernier, la Tunisie s'était hissée au rang de premier exportateur mondial d'huile d'olives. 2016 sera "comme une année de stabilisation", explique le représentant du FMI. 

En conséquence, "la croissance qui s'annonce en 2016 ne répond pas aux aspirations du peuple tunisien. Elle n'est pas suffisamment forte (...) pour résorber le chômage", supérieur à 15% au niveau national, a-t-il prévenu.

Dans ce contexte, le gouvernement, qui a présenté l'été dernier un "plan de développement 2016-2020", doit modifier sa politique budgétaire pour relancer l'économie et faire que la croissance "touche les plus vulnérables, et aussi les régions défavorisées", insiste M. Blotevogel.

Même si le "déficit global" a été "plutôt maîtrisé", "on fait face à un problème de composition du budget", a fait valoir le représentant du FMI. Selon lui, la "fonction publique" constitue "un fardeau lourd pour les dépenses de l'Etat" et "un défi très important pour l'économie tunisienne".

La hausse "importante de la masse salariale" depuis 2011 s'est faite au détriment de l'investissement public, regrette M. Blotevogel.

"Il faudrait renverser cette tendance. (...) L'idée serait vraiment de bâtir les bases pour une croissance inclusive et refaire le modèle de développement de la Tunisie", a-t-il plaidé.

"Comment le faire' C'est justement ce (...) que nous sommes en train de discuter", a-t-il souligné en référence aux négociations en cours à Tunis sur un nouveau plan d'aide.

Et les discussions "avancent bien", selon lui. D'ores et déjà, avec le gouvernement, "nous sommes d'accord sur l'objectif pour les grandes réformes, le diagnostic" sur la situation. "Il y a une parfaite cohérence de vues et maintenant les discussions se focalisent surtout sur le calendrier de mise en oeuvre", a dit M. Blotevogel.

La Tunisie avait annoncé en septembre dernier avoir demandé un nouveau plan d'aide au FMI, à l'occasion d'une visite de sa directrice générale, Christine Lagarde.

Son montant sera au moins équivalent à la précédente ligne de crédit, soit 1,7 milliard de dollars (1,55 milliards d'euros), a confirmé M. Blotevogel. 

Octroyée en 2013 sur deux ans (prolongés de sept mois), celle-ci entrait dans le cadre d'un programme destiné à soutenir la transition politique après la révolution qui a mis fin en 2011 à la dictature de Zine el Abidine Ben Ali.

Le futur plan s'étalera lui sur quatre ans, à la demande du gouvernement tunisien, a noté M. Blotevogel, ajoutant que le conseil d'administration du Fonds se prononcera sur sa validation le 22 avril.

"Nous sommes d'accord sur le fait qu'il ne faudrait pas s'endetter juste pour s'endetter", a-t-il encore déclaré, en réponse aux critiques en Tunisie contre ce nouveau recours au FMI.

Le premier plan "s'est déroulé dans des conditions très difficiles", a-t-il rappelé, citant la faible croissance en zone euro --premier partenaire de la Tunisie-- et la crise en Libye voisine.

Il a également évoqué une transition démocratique tunisienne qui "a mis plus de temps qu'attendu", "a été accompagnée par des manifestations sociales (...) puis par cet aspect sécuritaire devenu de plus en plus important avec les attentats terroristes en 2015".

Si les autorités ont "réalisé d'importants progrès dans plusieurs champs, dont le secteur financier" avec la restructuration des banques publiques, il a relevé que des "vulnérabilités macro-économiques persistent".

La Tunisie a "fait preuve d'une certaine résilience parce que les grands équilibres macro-économiques ont pu être maintenus", a noté le responsable du Fonds. Mais il existe "un certain nombre de défis, de faiblesses qui persistent".